Le franc CFA est une monnaie commune actuellement utilisée par quatorze pays africains et se trouve incroyablement sous-évaluée par rapport à l’euro. Un euro vaut actuellement un peu plus de 655 francs CFA, ce qui est étonnamment disproportionné pour une monnaie utilisée par quatorze États réunis. Cette situation pose des questions sur la souveraineté économique de ces pays et sur la persistante emprise coloniale de la France.
Origine et création du franc CFA
La création du franc CFA remonte à décembre 1945, lorsque la France, récemment libérée de l’occupation nazie, cherchait à rétablir sa puissance coloniale, notamment en Afrique. Charles de Gaulle institue alors le franc CFA, initialement appelé « franc des colonies françaises d’Afrique ». Cette monnaie, émise par la Caisse centrale de la France d’outre-mer, était directement indexée sur le franc français.
Au départ, le taux de change était de 1,7 francs métropolitains pour 1 franc CFA, puis il passe à 2 francs français en 1948. Bien que ce taux semblait favorable aux pays africains, il ne fait que masquer une réalité économique désavantageuse.
Évolution et dévaluation
Malgré un taux initial favorable, le franc CFA commence rapidement à se dévaluer. En 1960, au lendemain de l’instauration du nouveau franc français, le franc CFA ne vaut plus que 0,02 francs français. Cette dévaluation s’accompagne de critiques sévères concernant le contrôle de cette monnaie par le Trésor français. Les pays utilisant le franc CFA doivent déposer 50 % de leurs réserves de change au Trésor français, offrant ainsi une aubaine économique à la France.
Le franc CFA aujourd’hui
Aujourd’hui, quatorze pays africains utilisent encore le franc CFA. Ces pays sont regroupés en deux zones : l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). Les huit États de l’UEMOA sont le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. Les six États de la CEMAC incluent le Cameroun, la République centrafricaine, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad.
Avec l’adhésion de la France à l’euro, le taux de change du franc CFA a été fixé à un peu plus de 655 francs CFA pour 1 euro. Ce taux désavantageux exacerbe les difficultés économiques des pays utilisateurs, créant une situation où la France continue de profiter économiquement, tandis que les pays africains sont maintenus dans une certaine dépendance.
Critiques et implications économiques
Les critiques vis-à-vis du franc CFA sont nombreuses. La dévaluation de cette monnaie par rapport à l’euro est souvent perçue comme un outil de contrôle néocolonial par la France. En effet, la Banque de France contrôle les politiques monétaires des banques centrales africaines des pays membres, garantissant ainsi leur liquidité en échange d’une stricte surveillance de leurs dépenses publiques.
Cette situation entraîne souvent des retards dans le paiement des factures de l’État et les salaires des fonctionnaires dans les pays concernés. Les États eux-mêmes sont placés dans une position financière précaire, tandis que la France bénéficie économiquement de cette situation.
Les perspectives de changement
Avec l’émergence d’élites africaines désireuses de renverser l’héritage colonial, la pression monte pour réformer le franc CFA. Les promesses françaises de réformes incluent la fin de l’obligation de dépôt des réserves de change au Trésor français et le retrait des représentants français des organes de décision et de contrôle des banques centrales africaines.
Le franc CFA devrait également changer de nom pour devenir l’eco, symbolisant une rupture avec son héritage colonial. Toutefois, ces changements suscitent des doutes sur leur réelle efficacité à améliorer l’économie de ces pays sans que la France ne continue de profiter des ressources africaines.
L’avenir du franc CFA et de l’émancipation africaine
Aujourd’hui, d’autres puissances comme la Chine et la Russie gagnent du terrain en Afrique, remettant en question l’emprise française sur le continent. Plusieurs pays du Sahel, tels que le Mali, le Niger et le Burkina Faso, réduisent leur dépendance à la France, tandis que des pays comme le Tchad voient également diminuer la présence française.
Face à ces défis, la France tente de redorer son image en Afrique. Toutefois, de nombreux observateurs et leaders africains restent sceptiques quant à la réelle volonté de la France de lâcher prise sur ses anciennes colonies. Malgré les changements symboliques, la perception selon laquelle le franc CFA reste un outil néocolonial persiste.
L’avenir des pays utilisant le franc CFA reste incertain. Les économies africaines doivent se libérer de cette emprise pour espérer un développement économique réel. Toutefois, la transition vers une véritable indépendance économique est un processus complexe qui nécessitera des efforts concertés de toutes les parties prenantes.
Source : Lama Faché