Depuis 2016, nos voisins anglais s’inquiètent de voir disparaître leurs millionnaires à une vitesse alarmante. Entre 2017 et 2023, 15 700 riches résidents britanniques sont partis chercher des horizons plus verdoyants ailleurs, et un exode massif est prévu cette année avec une estimation de 9 500 nouveaux départs. Considéré pendant des siècles comme une place mondiale pour les affaires, le Royaume-Uni n’attire plus autant les plus fortunés, qui lui préfèrent désormais la météo et la qualité de vie de pays plus sûrs et plus accueillants.
Le phénomène ne se limite pas aux Britanniques. L’ensemble de l’Europe assiste à une fuite des grandes fortunes et des multinationales vers des contrées plus attrayantes. Ce n’est pas seulement la fiscalité qui les pousse à partir, mais bien d’autres facteurs comme la sécurité, la stabilité sociale, économique et politique.
Une espèce en voie d’apparition
Dans l’écosystème économique, les riches se multiplient rapidement. Ils s’installent en Amérique du Nord, en Europe, et désormais de plus en plus en Asie. Cette catégorie inclut ceux ayant un patrimoine supérieur à un million de dollars jusqu’aux multimilliardaires comme Bernard Arnault.
Ces riches aspirent à une vie remplie de luxe et de moments privilégiés. Selon le magazine Forbes, en 2024, le monde compte 2 271 milliardaires possédant 14 500 milliards de dollars, soit l’équivalent des PIB de la France, l’Inde, l’Allemagne et le Royaume-Uni réunis. À ces milliardaires s’ajoutent 59,4 millions de millionnaires, dont 243 000 disposent d’au moins 50 millions de dollars.
Bien que représentant seulement 0,75 % de la population mondiale, cette classe génère autant d’émissions de gaz polluants que les 5 milliards de personnes les plus pauvres. Entre jets privés, yachts, voitures de luxe, et tourisme spatial, ils contribuent fortement aux émissions de gaz à effet de serre. Par leur influence sur les classes dirigeantes et leur évasion fiscale, ils sont souvent critiqués malgré leurs contributions.
À quoi sert un riche ?
Les riches jouent un rôle controversé mais significatif dans l’économie. En tant qu’investisseurs potentiels, ils soutiennent les grands projets, la recherche et les technologies émergentes. Leurs entreprises et activités créent des emplois et bénéficient à d’autres secteurs par effet d’entraînement.
Philanthropes pour la plupart, ils financent des causes environnementales et sociales, déchargeant ainsi les États d’une part de leurs responsabilités. Consommateurs avides, notamment de luxe, ils soutiennent un marché estimé à 1 500 milliards de dollars en 2023.
En théorie, leurs revenus élevés devraient aboutir à des recettes fiscales importantes, mais dans la pratique, leur évitement des impôts limite ces contributions.
Pourquoi partent-ils et où vont-ils ?
Plus mobiles que jamais, les riches réagissent rapidement à l’incertitude. Plus que la fiscalité, c’est la sécurité qui les pousse à partir :
- Stabilité diplomatique : Ils évitent les zones de conflit.
- Stabilité sociale : Une guerre civile ou des émeutes sont rédhibitoires.
- Stabilité économique : La croissance, la protection de l’épargne et l’inflation modérée sont cruciales.
- Stabilité politique : Un gouvernement favorable rassure quant à leurs affaires.
Les destinations préférées incluent l’Australie, Singapour, les États-Unis, la Suisse, les Émirats arabes unis, le Portugal et Dubaï, où ils trouvent tranquillité et environnement favorables pour leurs affaires.
Quelles conséquences en Europe et en France ?
Pour la France, où le nombre de millionnaires atteint des millions, la fuite des riches et des investisseurs pourrait avoir des effets dévastateurs. Avec une économie stagnante, un solde commercial déficitaire et une dette publique astronomique (3 159,7 milliards d’euros au 30 mars), la France présente de multiples signaux d’alerte pour les plus fortunés.
Les perspectives économiques sont faibles avec une croissance quasi nulle. Bien que l’inflation soit retombée à 2,2 % en juin dernier, son cumul sur trois ans atteint 12,8 %. La hausse des prix alimentaires (+18 %) et des énergies (+44,5 % pour l’électricité) pèse sur la consommation.
Sur le front de l’emploi, les promesses de réindustrialisation ne se concrétisent pas, et l’activité industrielle continue de baisser (-2,3 % en mai). La balance commerciale reste négative malgré une amélioration post-pandémie.
Le poids de la dette est écrasant, avec des intérêts à rembourser de 500 milliards d’euros sur 10 ans. La situation politique instable et les défis de gouvernance (absence de majorité absolue) compliquent encore le tableau.
Dans ce contexte, le départ des riches, potentiellement suivi par les classes moyennes supérieures, pourrait rapidement aggraver la situation. Les faillites d’entreprises et les licenciements risquent de provoquer un coup d’arrêt à la consommation intérieure et une baisse de l’attractivité économique, faisant craindre une crise économique majeure.
Retenir les riches, tout en créant un environnement favorable à l’investissement et à l’innovation, sans pour autant alourdir la fiscalité, est un défi de taille. Cela demande une révision profonde du modèle économique et social actuel pour un avenir plus inclusif et prospère.
Sources :