Ariane Bilheran, psychologue clinicienne, Docteur en psychopathologie et philosophe, est une spécialiste reconnue de la psychologie du pouvoir. Il y a deux ans, elle a publié un ouvrage, « Chroniques du totalitarisme 2021« , qui compile ses chroniques de l’année 2021 ainsi que plusieurs articles traitant du phénomène totalitaire, en particulier sous l’angle de la crise sanitaire. Lors de son entretien avec Henri-Michel Thalamy, elle aborde en profondeur les mécanismes qui sous-tendent le totalitarisme et les profils capables de lui résister.
La société de la séduction et du consumérisme
Ariane Bilheran débute en soulignant que notre société, qu’elle qualifie de perverse selon les termes de Guy Debord, valorise aujourd’hui la séduction, la consommation et les possessions plutôt que la discipline, l’effort et l’être. Elle exprime que ces valeurs déformées ont préparé les masses à accepter et même à demander plus de totalitarisme. La confusion entre le vrai et le faux, le bien et le mal, ainsi que la recherche du plaisir immédiat ont conduit notre société dans une impasse narcissique.
La dégénérescence morale et linguistique
Selon Bilheran, cette dérive totalitaire se manifeste également par l’adoption d’un novlangue, une langue corrompue symptomatique d’une dégénérescence morale. Elle fait référence à la manière dont la langue a été manipulée durant la crise sanitaire pour justifier des mesures extrêmes et réduire l’esprit critique des individus. Bilheran évoque également un déclin intellectuel, culturel et moral orchestré depuis des décennies, en particulier au sein de l’Éducation nationale, qui a contribué à la lobotomisation des masses face à la propagande.
La défaillance de l’éducation et de l’esprit critique
La régression du niveau intellectuel des jeunes générations est au cœur des préoccupations de Bilheran. Elle critique sévèrement les méthodes modernes d’enseignement, notamment la Digital School, et regrette la perte d’enseignements fondamentaux comme la grammaire et les mathématiques, essentiels pour développer un esprit logique et critique. Cette faille éducative a ainsi contribué à un appauvrissement du langage et des émotions, rendant les individus plus vulnérables à la manipulation.
La suppression du droit de mener une vie héroïque
Bilheran explique que la crise sanitaire a privé les peuples de leur droit à mener une vie héroïque, c’est-à-dire une vie où l’on est libre de faire des sacrifices pour des causes transcendantes plutôt que par obligation. Elle critique la manière dont les mesures sanitaires ont écarté la possibilité pour les individus de prendre des risques personnels pour aider les autres, confinant ainsi les gens à une existence de survie plutôt qu’à une vie significative et héroïque.
Les victimes principales : les enfants et la tendresse humaine
Les enfants, en tant que symboles d’innocence, ont selon elle été particulièrement ciblés par les phénomènes totalitaires. L’attention accrue au respect des règles sanitaires a limité les expressions de tendresse et d’affection, essentielles au développement psychologique des enfants. Bilheran s’inquiète des conséquences psychologiques à long terme sur les plus jeunes, notamment l’augmentation des taux de suicide chez les enfants.
Les profils susceptibles de servir ou de résister au totalitarisme
Bilheran dresse une typologie des individus susceptible de participer activement au phénomène totalitaire et ceux capables de lui résister. Les paranoïaques, les psychopathes, les pervers et une majorité de névrosés sévères, qui perdent leur individualité sous la pression, constituent les profils les plus dangereux car ils deviennent des instruments du système. À l’inverse, les personnes ayant une forte autonomie interne, une capacité d’isolement, et une expérience personnelle de situations extrêmes ou de confrontation avec la corruption sont plus à même de résister.
L’importance du travail sur soi
Pour résister à l’embrigadement, Bilheran insiste sur l’importance de mener un travail intérieur. Elle évoque la nécessité de vaincre ses propres peurs et manipulations émotionnelles pour conserver sa santé mentale et morale face à l’adversité. Elle souligne que maintenir cette spontanéité individuelle et créative constitue une forme de résistance imprévisible et redoutée par les systèmes totalitaires.
La charité comme remède au totalitarisme
Bilheran distingue enfin la charité de la solidarité, soulignant que la première est un don pur, sans attente de retour, et constitue une véritable expression d’amour inconditionnel. Elle considère que la charité est le remède au totalitarisme car elle oppose à la peur et à la haine un acte de pure générosité et de miséricorde.
Prendre conscience et agir
Pour conclure, Bilheran exhorte les individus à chercher à comprendre les mécanismes dans lesquels nous sommes plongés afin de pouvoir élaborer des stratégies de réponse pertinentes. Elle appelle à défendre l’héritage des luttes pour les droits menées par nos ancêtres et à ne pas abandonner tant d’années de transmission et d’efforts.
Pour retrouver les articles, ateliers et conférences d’Ariane Bilheran, rendez-vous sur son site.
Journaliste : Henri-Michel Thalamy – Twitter / Epoch Times.