Depuis l’arrestation de l’influent rappeur et producteur américain P. Diddy, connu sous divers pseudonymes tels que Puff Daddy et Diddy, des accusations massives et troublantes de trafic sexuel et de violences sexuelles à l’encontre de plus de 100 personnes ont vu le jour. Ces allégations relancent la discussion sur la culture de l’impunité dans l’industrie musicale, évoquant des parallèles avec l’affaire Weinstein, qui avait bouleversé le monde du cinéma en 2017 et déclenché le mouvement MeToo.
Une figure emblématique de l’industrie musicale
P. Diddy, aujourd’hui âgé de 54 ans, a bâti un empire autour de son label Bad Boy Records, révélant des figures majeures du rap américain. En plus de sa carrière de producteur, il a également connu un grand succès avec des titres comme Can’t Nobody Hold Me Down, sorti en 1997. Le 17 septembre dernier, il a été placé en détention provisoire, accusé d’avoir utilisé son influence pour orchestrer un réseau de trafic sexuel impliquant drogue et alcool afin de soumettre ses victimes.
Les accusations contre P. Diddy sont comparées à celles visant Harvey Weinstein, producteur hollywoodien accusé en 2017 de harcèlement et d’agressions sexuelles par plus de 80 femmes. Cette affaire avait ouvert la voie au mouvement MeToo, qui a bouleversé l’industrie cinématographique, et certains espèrent qu’un mouvement similaire pourrait enfin émerger dans le milieu musical.
L’industrie musicale face au silence
Malgré la multiplication des accusations contre des figures majeures de la musique, un mouvement MeToo similaire à celui du cinéma tarde à se concrétiser. On peut citer le cas d’artistes tels que R. Kelly, condamné en 2022 à 30 ans de prison pour crimes sexuels, notamment contre des adolescentes, ou encore Marilyn Manson, accusé de violences sexuelles par son ex-conjointe. En France, le rappeur Moha La Squale a également été accusé d’agressions sexuelles en 2021.
En 2021, un mouvement #MusicToo avait vu le jour, encouragé par le témoignage de victimes d’abus dans le secteur de la musique. Selon une enquête menée en 2019 par le collectif français Cura, une femme sur trois travaillant dans l’industrie musicale avait été victime de harcèlement sexuel, un chiffre bien supérieur à celui observé au niveau national, qui se situe à une femme sur cinq.
Pourquoi l’industrie musicale échappe-t-elle à une remise en question?
L’une des raisons avancées est la différence de médiatisation entre les accusations portées dans le cinéma et celles dans la musique. Dans l’affaire Weinstein, des femmes mondialement connues telles qu’Angelina Jolie avaient contribué à amplifier la couverture médiatique. Dans l’industrie musicale, de nombreuses accusations proviennent de femmes moins célèbres, ce qui diminue leur visibilité et leur impact médiatique.
L’affaire P. Diddy, cependant, a vu l’une de ses premières accusatrices, la chanteuse Cassie, son ex-compagne, prendre la parole, ce qui a encouragé d’autres femmes à témoigner. Mais cette prise de parole est souvent étouffée par des pressions colossales, comme l’a souligné Drew Dixon, ancienne professionnelle de la musique.
Le rôle du système en place
Drew Dixon explique que l’industrie protège ses stars, car leur chute entraînerait celle de tous ceux qui bénéficient financièrement de leur succès. Cet écosystème crée une forme d’omerta, où les abus sont passés sous silence pour préserver les intérêts de tous. De plus, certaines superstars sont perçues comme des « génies », un statut qui, selon des chercheurs comme Caroline Elman, professeur à l’Université de Californie du Sud, pourrait pousser certains à excuser leurs comportements abusifs.
Un paradoxe troublant : l’augmentation des ventes
Un phénomène étonnant a été observé après la condamnation de certaines célébrités pour crimes sexuels. Les ventes de la musique de R. Kelly ont augmenté de plus de 500% après sa condamnation, tandis que les chansons de Diddy ont connu une hausse de 18,3% sur les plateformes de streaming la semaine suivant son arrestation. Ce phénomène pourrait être en partie dû à la curiosité des gens face à la médiatisation de ces affaires, mais reste néanmoins surprenant.
Des efforts de prévention en cours
Malgré ces révélations choquantes, certaines initiatives commencent à voir le jour pour lutter contre les violences sexuelles dans l’industrie musicale. La prévention joue un rôle central, mais il reste encore beaucoup à faire pour parvenir à une véritable libération de la parole et à une remise en question profonde de cette industrie.
Source : HugoDécrypte