François Asselineau, président de l’Union Populaire Républicaine (UPR), livre une analyse critique du mouvement du 10 septembre 2025 en procédant à un examen historique des mobilisations populaires qui ont marqué la France depuis 2010. Cette rétrospective révèle des schémas récurrents et questionne l’efficacité réelle de ces soulèvements médiatisés.
Une succession de mouvements sans résultats concrets
Depuis 2010, la France a connu une série de mobilisations populaires dont le bilan s’avère décevant. Tout a commencé avec l’opuscule « Indignez-vous » de Stéphane Hessel en 2010, qui appelait les citoyens à garder leur capacité d’indignation face aux injustices. Ce livre, qui avait notamment évoqué la situation à Gaza, a inspiré le mouvement des Indignés en Espagne puis en France à partir de mai 2011, rassemblant étudiants et travailleurs pendant quelques semaines avant de s’essouffler sans résultat tangible.
Le mouvement des Bonnets Rouges a pris le relais en juin 2013, né d’un collectif d’une trentaine de chefs d’entreprise bretons opposés aux taxes sur les entreprises et les transports routiers. Malgré une organisation qui paraissait très préparée et des milliers de manifestants arborant des bonnets rouges pendant près d’un an, jusqu’en juin 2014, le bilan reste nul.
Des mouvements aux origines parfois troubles
Le « Jour de Colère » du 26 janvier 2014 illustre comment certains mouvements peuvent masquer leurs véritables instigateurs. Présenté initialement comme une manifestation spontanée de mécontentement populaire, il s’est révélé être orchestré par l’extrême droite, notamment le Front National, avec la participation de certains éléments de l’UMP et de Patrick Buisson, proche de Nicolas Sarkozy.
En février 2016, François Ruffin, député La France Insoumise, lance le mouvement « Nuit Debout » basé sur la « convergence des luttes ». Ces manifestations nocturnes place de la République à Paris ont rassemblé diverses revendications catégorielles, des mouvements altermondialistes, écologistes et d’extrême gauche, ainsi que les « zadistes » opposés au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Malgré des mois de mobilisation, ce mouvement n’a produit aucun changement concret.
L’exception des Gilets Jaunes et sa répression sanglante
Le mouvement des Gilets Jaunes, débuté le 17 novembre 2018, constitue un cas particulier. Bien qu’annoncé à grand renfort de médiatisation, il a pris une ampleur qui a semblé dépasser ses organisateurs. Des millions de Français se sont mobilisés avec une sincérité remarquable, au point de mettre en difficulté le pouvoir macronien.
La répression a été d’une violence inouïe, avec des dizaines de personnes mutilées à vie, éborgnées, contrastant avec la gestion relativement pacifique de Mai 68. Macron et son ministre de l’Intérieur Christophe Castaner ont orchestré une répression qui a fait réagir l’ONU et plusieurs pays européens. Le mouvement a été progressivement torpillé par l’infiltration d’agents provocateurs tenant des propos racistes ou antisémites, et par des actions de « black blocks » qui ont effrayé la France profonde.
Malgré cette mobilisation historique et les cahiers de doléances rédigés dans toute la France, le bilan reste dérisoire : ces documents ont été archivés ou détruits, et aucune modification substantielle de la politique gouvernementale n’a eu lieu.
La suite : barbecues, apéros et nouveaux mouvements
François Ruffin a tenté de relancer la mobilisation avec les « Barbecues anti-Macron » le 4 mai 2019, suivi par les « Apéros anti-Macron » lancés par Antoine Léoman en juin 2023. Ces initiatives conviviales n’ont produit aucun changement politique.
Entre-temps, la période Covid (2020-2022) a vu se développer des manifestations contre les mesures gouvernementales jugées délirantes : confinements à répétition, administration massive de Rivotril dans les EHPAD, restrictions absurdes dans les commerces. Malgré la mobilisation de nombreux citoyens, ces protestations n’ont pas fait dévier d’un millimètre la politique gouvernementale.
En 2025, Alexandre Jardin a créé le « Mouvement des Gueux », soutenu par des personnalités de droite comme Éric Ciotti, Christian Estrosi ou Robert Ménard. Ce mouvement, qui s’attribue l’abandon des Zones à Faibles Émissions, présente les mêmes caractéristiques que ses prédécesseurs.
Quatre caractéristiques communes révélatrices
Selon l’analyse d’Asselineau, tous ces mouvements présentent quatre points communs troublants. Premièrement, leurs organisateurs et objectifs précis restent flous, à l’exception de revendications catégorielles et du référendum d’initiative citoyenne (RIC). Deuxièmement, ils bénéficient d’une médiatisation exceptionnelle sans explication claire de cette soudaine attention médiatique.
Troisièmement, et c’est peut-être le plus révélateur, aucun de ces mouvements ne remet jamais en question l’Union européenne, l’euro ou l’OTAN. Ils protestent contre les conséquences sans s’attaquer aux causes profondes des problèmes français. Quatrièmement, leur bilan final est systématiquement nul, aboutissant au découragement et au désespoir des participants.
Le 10 septembre 2025 : même schéma ?
Fort de cette analyse historique, François Asselineau exprime ses réserves sur le mouvement du 10 septembre 2025. Il y retrouve les mêmes caractéristiques : organisateurs flous, médiatisation importante, absence de remise en cause des institutions européennes et atlantiques, risque de bilan nul.
Selon lui, ces mouvements fonctionnent comme des « paratonnerres » qui captent la colère populaire pour mieux la neutraliser, évitant qu’elle ne se transforme en véritable changement politique. Ils entretiennent un romantisme révolutionnaire qui détourne les énergies citoyennes des véritables enjeux.
L’appel à une révolution légale
Pour Asselineau, il n’existe que deux moyens de changer la société : la voie légale par les élections ou la voie illégale par la révolution violente ou le coup d’État militaire. Rejetant cette dernière option, il appelle à abandonner le romantisme révolutionnaire pour se concentrer sur l’échéance de 2027.
Il invite les Français à se rassembler derrière un mouvement politique proposant une véritable révolution : la sortie de l’Union européenne, de l’euro et de l’OTAN, seules mesures capables selon lui de redonner à la France sa souveraineté et de résoudre les problèmes structurels du pays.
Cette analyse, qui peut paraître désenchantée, se veut un appel à la lucidité face aux manipulations récurrentes de l’opinion publique. Elle invite à une réflexion profonde sur l’efficacité des mobilisations spontanées versus l’engagement politique structuré dans la durée.
Source : Union Populaire Républicaine